Crise sanitaire : le maire peut prendre des mesures de police en présence de raisons impérieuses Abonnés
Pour justifier son arrêté, la commune établit que sa population comporte 25 % de personnes de plus de 60 ans contre 19 % dans le reste de la région. Les espaces verts ont tous été fermés et ils représentent 30% de la superficie communale. De plus, les commerces alimentaires sont concentrés dans une rue piétonne du centre-ville dont la largeur est par endroit de 4 mètres, ce qui entraîne une forte affluence à certaines heures de la journée et rend difficile le strict respect des gestes de distanciation sociale.
Les juges rappellent qu’il existe une police spéciale qui donne au 1er Ministre, au Ministre chargé de la Santé et aux préfets la possibilité de prendre des mesures pour restreindre la circulation des personnes, interdire aux personnes de sortir de leur domicile, ordonner la fermeture provisoire d'établissements, interdire les rassemblements sur la voie publique pendant les périodes d'état d'urgence sanitaire (art. L. 3131-15, code de la santé publique). Le maire dispose également de prérogatives, car « la police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment (…) : 5/ le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires (…) les maladies épidémiques ou contagieuses, de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure (…) » (art. L. 2212-2, code général des collectivités territoriales).
Pour les juges, le maire peut prendre des mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, également pendant la période d'état d'urgence sanitaire. A ce titre, le maire peut prendre des dispositions pour contribuer à la bonne application des mesures décidées par l'Etat, notamment en interdisant l'accès à des lieux où sont susceptibles de se produire des rassemblements, compte tenu des circonstances locales.
En revanche, la police spéciale de l’Etat fait obstacle, pendant la période d'état d'urgence sanitaire, à ce que le maire prenne des arrêtés destinés à lutter contre la catastrophe sanitaire, sauf en présence de raisons impérieuses liées à des circonstances locales qui les rendent indispensables et à condition de ne pas compromettre la cohérence et l'efficacité des mesures prises par l'Etat (par exemple, une interdiction de circuler auprès d’un EHPAD où il existe de nombreux cas recensés, la déambulation dans les ruelles, etc…).
Or, dans cette affaire, la démographie de la commune ainsi que la concentration de ses commerces dans un espace parfois restreint ne caractérise pas une raison impérieuse. Les juges suspendent l’arrêté du maire.
Conseil d’Etat, n° 440057, 17/04/2020.
Jean-Philippe Vaudrey le 02 juin 2020 - n°52 de Police municipale et Pouvoirs de police du maire
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